De l’illustration à la coproduction de résultats
Dans cet entretien, Sandra Villet analyse la place et la contribution du dessin à main levée dans les travaux de recherche. En quoi permet-il de nourrir les résultats d’une recherche ? Et en retour qu’apporte au designer la collaboration avec des chercheurs en sciences humaines et sociales ? La designer et illustratrice est en effet engagée dans deux chantiers de recherche avec LEROY MERLIN Source. Elle analyse ici les liens entre recherche et dessin.
Le dessin dans la recherche : une approche en immersion de Sandra Villet
Sandra Villet travaille actuellement sur deux chantiers de recherche. L’un sur le travail chez soi, l’autre sur l’arrivée du premier enfant. Sa méthode? Originale. Elle travaille en effet par immersion dans la vie des habitants. Son but ? Représenter à main levée les espaces de leurs logements. Donc, traduire leurs manières de s’y installer et de s’y déplacer, les usages qu’ils y déploient. Mais aussi déceler les aménagements que des étapes de vie importantes exigent d’eux. Puis, elle construit et propose aux chercheurs avec qui elle collabore « des scénarii dessinés (à partir de paroles, moments, situations observées). Ceux-ci révèlent les dynamiques à l’œuvre dans l’espace et dans les relations ». Le dessin permet de jouer sur ce qui apparait dans le champ et ce qui se devine du hors-champ. « On peut faire des superpositions, faire bouger les personnages. Je peux rendre compte de différentes séquences d’un même moment. »
« Ce que permet le dessin en complément d’une approche sociologique, c’est de saisir les mouvements, les places et les déplacements des corps, ce que ne permet pas la seule utilisation des entretiens. » Elsa Ramos, sociologue
La recherche dans le dessin : des apports croisés
La designer explique qu’en design, on s’intéresse aux usages. Et c’est ce qu’elle retrouve dans sa collaboration avec les chercheurs LEROY MERLIN Source. Ainsi elle explique que, dans les recherches sur lesquelles elle a travaillé, son rôle est de « porter mon attention sur l’espace du logement ». Elle détaille la composition des espaces bien sûr. Mais aussi les aménagements et bricolages de ces espaces par les habitants. Elle observe la « praticité des choses ». Et cette observation l’éclaire sur ce dont on a besoin aujourd’hui pour vivre chez soi, depuis les aménagements jusqu’à l’élaboration d’un cadre agréable. Elle a aussi pu identifier que pour se sentir « chez-soi », il y a des mouvements et des changements constants dans l’habitat. « Une des leçons de ces deux chantiers est que nous ne cessons pas de recomposer nos espaces de vie et les gestes qui permettent d’y vivre. En tant que designer, j’ai appris que nous devons sans cesse jongler avec des dimensions plus globales comme la qualité des espaces, de la lumière et des matériaux et des besoins très individualisés. »