Un dialogue sensible entre habitants et objets
Existe-t-il une économie circulaire à l’intérieur des logements ? Si oui, comment les habitants pratiquent-ils à leur échelle ? Cette nouvelle recherche Leroy Merlin Source, réalisée en partenariat avec CITEO, sur L’économie circulaire domestique explore les pratiques et comportements qui relèvent d’une petite économie circulaire, intime, à hauteur d’habitants, sous les radars des filières de recyclage et de réemploi. Réparation, réemploi, transformation, up-cycling, recomposition… Ensemble Benjamin Pradel, sociologue et Emile Hooge, prospectiviste, décryptent les relations des habitants à leurs objets.
Économie circulaire : les interactions des habitants avec leurs objets
Dans la première partie de la recherche, ils montrent comment les habitants interagissent avec leurs objets, avec beaucoup de métaphores de la vie et de la mort pour parler de l’état et de l’utilité des objets. Ils cherchent très souvent à leur donner une seconde vie, à prolonger leur existence, quitte s’il le faut à les utiliser en mode dégradé. Ils en conservent parfois des fragments ou des composants qui peuvent trouver une nouvelle utilité. Les objets conservés sont aussi les souvenirs des personnes disparues et de l’histoire familiale.
Un dialogue habitants-objets
La seconde partie de la recherche explore comment les habitants dialoguent avec leurs objets. Elle met à jour quatre modalités de dialogue entre les habitants et leurs objets :
- La consonance : c’est la relation la plus banale et satisfaisante des habitants avec leurs objets. On parle de consonance quand les objets conviennent aux personnes, jusqu’à leur évacuation.
- La dissonance : quand les objets embarrassent et encombrent aussi bien l’espace de la maison que l’esprit des habitants.
- Le silence : quand l’objet n’a plus vraiment d’usage. Les habitants le conservent « au cas où », pour son potentiel.
- La résonance : quand l’habitant redécouvre l’objet. Avec une créativité nouvelle qui va lui donner une seconde vie.
Le silence et la résonance montrent combien les habitants sont en relation active avec leurs objets.
Les relations des habitants et de leurs objets
Et la recherche pousse encore plus loin l’analyse, en révélant trois figures d’habitants dans ces relations actives avec leurs objets :
- L’habitant matériauthécaire : il décompose les objets, stocke les composants (chutes, pièces, câbles, bois, tissus…) pour les remettre en œuvre plus tard.
- L’habitant alchimiste transmute les « obchets » qui sont restés entre la vie et la mort. Il les sublime, il leur trouve un nouvel usage, une nouvelle fonction.
- L’habitant troubadour ne transforme pas ou peu l’objet, mais il lui donne un nouvel usage en inventant pour lui un nouveau récit.
Économie circulaire de tri et économie circulaire domestique
Finalement, la recherche permet de montrer que deux types d’économie circulaire cohabitent et se complètent :
- L’économie circulaire des filières de tri et de transformation, en quête d’efficacité et de remise dans le circuit de la consommation.
- L’économie circulaire domestique, à hauteur d’habitants, plutôt en quête de robustesse, avec lenteur, incertitude et incomplétude.
Raconter l’économie circulaire en récit graphique
Sur la base des enregistrements de la vingtaine d’entretiens réalisés, Sandra Villet a composé un récit graphique, une fiction qui reprend les citations réelles des habitants. Elle est intitulée Jusqu’à ce que… / l’habitant passeur de vies. Cette recherche graphique a été réalisée au stylo, à l’encre et au café (qui a trouvé ainsi une seconde vie).
Nos ressources sur l’économie circulaire
Cette recherche a été précédée d’un état de l’art intitulé La petite économie circulaire / Exploration des pratiques domestiques. Et vous retrouvez aussi dans le rapport Économie circulaire domestique les trois récits graphiques de Sandra Villet qui viennent enrichir les trois chapitres du rapport.