Habiter Arrangements

Impact des expériences corporelles de l'espace et manières d'habiter


Recherche

LEROY MERLIN Source présente sa nouvelle recherche sensible et artistique sur l’habitat : comment les expériences de l’habiter de l’enfance façonnent-elles nos manières d’habiter aujourd’hui ? Intitulée « Arrangements. Expériences corporelles de l’habiter au fil de la vie. », la recherche s’intéresse aux interactions du corps (qui ressent et perçoit) avec l’espace habité.

Expérience de l’habiter : le corps dans l’espace observé par la recherche habitat

Ce qui donne vie et singularise nos manières d’habiter, ce sont les expériences que chacun fait de son corps et de son corps dans l’espace. On parle alors d’expériences perceptives, sensorielles et relationnelles. Elles s’enracinent à travers des souvenirs corporels d’enfance liés à une expérience heureuse ou traumatique de l’espace. Les habitants établissent donc un lien entre cette dernière et le vécu actuel de leur logement. Cette expérience de l’enfance donne une signification individuelle aux manières d’habiter. Et leurs échos se poursuivent de logement en logement, tout au long de la vie. Ils soutiennent et animent la singularité de nos manières d’habiter. En s’intéressant aux interactions du corps et de l’espace dans l’habiter, cette recherche met en lumière la continuité qui s’établit entre le corps (qui perçoit) et les espaces du logement.

La rencontre entre un chercheur et une artiste

Pour réaliser cette recherche, Pascal Dreyer, coordinateur scientifique et chercheur-associé Leroy Merlin Source et Florence Vernay, artiste, ont mobilisé trois approches :

  • L’observation participante avec des rencontres des personnes à leur domicile. Entretiens et observations des espaces de vie, des manières de s’y tenir et de s’y mouvoir dans les moments d’interactions avec l’équipe de recherche.
  • L’écoute analytique mobilisée sous la forme d’un «rêver/penser ensemble » de l’expérience corporelle de l’habiter avec chaque personne.
  • La création artistique pour réaliser des relevés sensibles des interactions corps-espace de chaque personne. Et repérer les limites matérielles et des frontières corporelles de l’expérience sensorielle de l’habiter propre à chacun. L’artiste a ainsi créé des images utilisées comme support privilégié de l’élaboration d’un « rêver/penser » à trois (personne, chercheur, artiste), tel que le définit le psychanalyste américain Thomas H. Ogden.

Les qualités de l’espace vécu du logement

Les personnes rencontrées dans le cadre de cette recherche sur les manières d’habiter corporellement son lieu de vie considèrent toutes leur logement actuel comme leur chez-soi. Elles le désignent par deux termes : « enveloppe » ou « cocon ». La recherche a fait apparaître quatre qualités attribuées à l’espace du logement :

  • La neutralité décrit principalement l’espace du logement à partir de ses fonctionnalités et de sa praticité.
  • La fluidité rend compte d’un espace vécu et organisé de telle sorte que le corps s’y déplace sans rencontrer d’obstacles.
  • La présence exprime le lien affectif qui unit l’habitant avec son logement en tant que réalité concrète.
  • La négativité de l’espace décrit la contrainte physique, psychique (angoisses) et physiologique (vertiges, malaises, etc.) que l’espace exerce sur l’habitant.

L’arrangement : les conclusions de la recherche

L’arrangement est le lieu d’une rencontre propre à chaque personne de son corps (peau, mouvements, perceptions) et de son histoire personnelle avec l’espace habité (cadre bâti, meubles, objets). Il permet d’identifier trois types de rencontres différentes du corps et de l’espace dans l’habiter :

  • La limite matérielle (cadre bâti ou meuble) comme contenant protecteur. Qu’il s’agisse de l’habitation toute entière ou d’un arrangement de meubles et d’objets à l’emprise limitée dans le logement, la limite matérielle joue un rôle essentiel de contenant protecteur. Elle protège le corps et l’intériorité de l’individu d’un extérieur dans lequel il est plongé au risque de l’indistinction. Elle l’enveloppe et le soutient.
  • Le primat du corporel. La peau joue ici un rôle central. L’adulte cherche à reproduire dans le logement (et dans des pratiques culturelles) une expérience sensorielle dans laquelle il a été tout à la fois « rempli » et « cerné ».
  • L’indiscernabilité entre limite matérielle et frontière corporelle. La frontière corporelle – à la fois concrète (la peau) et immatérielle (le souffle) – tend à se fondre avec la limite de l’environnement matériel ou naturel. Il est alors difficile, pour l’individu, d’exprimer si la limite de l’arrangement est donnée par le corps (un type de position du corps ou la respiration par exemple) ou par la matérialité de l’arrangement (le confort matériel d’une assise par exemple).

Attachement à son lieu de vie et mobilité spatiale et psychique

Que nous apprend l’arrangement sur l’enracinement des habitants dans leur chez-soi et leur mobilité spatiale et psychique ? Les regards croisés de cette recherche sur l’habitat, décryptent :

  • Les arrangements enracinés dans un lieu géographique et pris dans un cadre bâti  lient de manière forte l’habitant avec son lieu de vie. Il joue le rôle d’une enveloppe protectrice concrète. Mais il limite ou peut empêcher la mobilité spatiale et psychique de l’habitant, exposé à une double perte en cas de départ : la perte de soi et celle de l’arrangement.
  • Les arrangements qui trouvent leur appui principal dans le corps (frontière de peau, fonctionnement organique) et s’articulent à des meubles et des objets. Ils s’appuient sur des ressources disponibles banales (tables, chaises, fenêtres, angles de murs, etc.). Pour autant, il faut que les ressources soient disponibles dans le nouveau lieu de vie. Et, s’il s’agit d’un lieu de vie collectif, que l’aménagement de l’arrangement soit rendu possible et considéré. Le caractère transposable de l’arrangement peut être limité par une organisation spatiale et institutionnelle (en Ehpad ou dans tout autre lieu de vie collectif par exemple).
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